pour
loger ailleurs les officiers, La Licorne fut rendue à son
légitime propriétaire. Dans quel état, grands
dieux ! Ridel poussa des gémissements à être
entendus du rocher de Tombelaine, ce qui ne l'empêcha pas
de présenter au roi un Mémoire plutôt salé;
dans son factum, il insistait beaucoup sur ce que « des
quatorze vases en faïencée décorée,
si jolis et élégants qu'on n'avait pas besoin de
les dissimuler sous les lits, comme on le fait d'ordinaire »,
il n'en restait qu'un seul et encore était-il ébréché
!
L'intendant ordonna une vérification contradictoire et
Ridel fit constater les petits dégâts commis à
La Licorne par M. de Lancize et par ses officiers; il fut reconnu
que tous les vases de nuit, sauf un, avaient été
brisés; mais l'expert déclara que le seul pot de
chambre survivant (sic) n'était pas ébréché,
mais fêlé; il fixa à 269 livres le montant
des indemnités à accorder au plaignant.
Ridel réclamait aussi des dommages-intérêts
pour son manque à gagner. L'hôtelier montois
ne conaissait certainement pas le principe : Lucrum cessans, damnum
emergens, mais il savait « qu'il avait perdu beaucoup d'argent,
durant la fermeture de son hôtellerie ». Les pèlerins,
pendant ces deux années-là, étaient venus
en foule au Mont Saint-Michel; les vendeurs d'images, de cornets,
de béatilles, tous les bibelotiers en un mot, avaient fait
des affaires d'or; ses concurrents de la
Truie qui file, de la Sirène, des Quatre Fils Aymond
et de vingt autres auberges, avaient profité de la fermeture
de la sienne; il était