Un
instant, lorsque la fée avait prononcé le nom de
Hue de Maurever, une idée avait voulu entrer dans l'esprit
du petit Jeannin.
-Mademoiselle Reine... s'était-il dit.
-Ou son Esprit peut-être, avait-il ajouté, puisqu'on
dit qu'elle est défunte ! Nous avons glissé à
dessein sur la partie prosaïque de la scène. Par exemple,
nous n'avons parlé qu'une seule fois du panier de la fée.
Jeannin n'avait sans doute pas vu ce panier, qui n'allait pas
bien à une fée, mais qui eût été
tout à fait mal séant pour un Esprit.
Un Esprit n'ira jamais porter un panier contenant des poulets
(ô poésie !), un pain
et un flacon de bon vin vieux.
Non. Un Esprit est incapable de cela.
Jeannin, cependant, renonça bien plus vite à l'idée
de Reine de Maurever vivante qu'à l'idée de Reine
fantôme.
Et vraiment, il ne faut pas voir les choses sur ces grèves
si l'on veut rester dans la réalité.
Tout y revêt un cachet fantastique. La lumière, source
et agent de tout spectacle, s'y comporte autrement qu'en terre
ferme. De même que l'objet le plus commun placé au
centre du kaléidoscope brille tout à coup et se
teint de couleurs imprévues, de même les conditions
de l'atmosphère, la nature du sol, quelque chose enfin
qu'il importe peu de définir ici, font de ces grèves
un immense appareil où la dioptrique et la catoptrique...
Hélas ! bon Dieu, où allons-nous ? L'auteur affirme
sous serment qu'il a trouvé ces deux mots redoutables dans
un almanach.
Pour en revenir aux merveilles de nos grèves, aux mille
jeux de lumière qui trompent
l'oeil des riverains eux-mêmes et des Montois,
il faut dire qu'aucun appareil de physique n'en pourrait donner
une