père
Legros avait tendu habilement ses filets; ils formaient comme
un barrage; la mer, en se retirant,
laissait, soit dans des petites flaques d'eau, soit même
à sec, sur le sable, les poissons qui auraient franchi
les filets à mer montante, mais qui, au reflux, demeuraient
prisonniers des longues sennes.
« Oh! les beaux poissons! », s"écria Michel.
En effet, sans être miraculeuse, la pêche était
plutôt abondante; deux saumons, un gros turbot et plusieurs
mulets avaient route barrée. Les saumons aux têtes
fines, aux écailles argentées sous le ventre, mais
sombres sur le dos, gisaient lamentablement sur le sable; le,
turbot roulait de gros yeux, ouvrait une bouche vorace; par moments,
dans les convulsions de l'asphyxie, il rapprochait sa tête
de sa queue; on eût dit qu'il faisait le gros dos; puis,
tout à coup, il se détendait comme un ressort et
sautait à plusieurs pieds, montrant alternativement son
ventre blanc et son dos brunâtre sur lequel se hérissaient
des arêtes rugueuses. Le père Legros frappa. d'un
coup sec, le museau des saumons qui retombèrent morts;
mais les turbots secouèrent encore les hottes de leurs
soubresauts, quand les pêcheurs les y eurent jetés.
Les autres pêcheurs, dont les filets étaient voisins,
avaient aussi fait une excellente pêche. Ils trouvèrent
même un superbe esturgeon, poisson beaucoup