être
ce rocher, fut-il, lui aussi, témoin de cruels sacrifices
de Druides; peut-être une
statue païenne en a-t-elle,
jadis, profané le sommet; car on y voit une énorme
pierre levée, semblable à celles qui surgissent
du sol habité par les Celtes. Mais Bain se rassure en se
rappelant que le Mont-Tumbe a été sanctifié,
il y a plus d'un siècle, par le passage, et même
par le séjour des anachorètes Pair et Scubilion
et que les prières des ermites
de Sessiac et de Mandane ont, à jamais, éloigné
les faux dieux d'un pays où leurs temples subsistèrent
trop longtemps. Bain sait aussi que Messire Aubert, le pieux évêque
d'Avranches, médite d'élever une chapelle au sommet
du Mont-Tumbe, en l'honneur du glorieux archange qui triompha
de Satan.
« Et voilà que, tout à coup, Bain entend une
lointaine rumeur. Ce n'est pas le murmure du vent dans les arbres,
car aucun souffle d'air ne passe au milieu des feuillages ; ce
ne sont pas les sourds grondements du tonnerre; le ciel est d'une
pureté parfaite, ce n'est pas le bruit de la mer qui déferle,
car, par delà les falaises de Chausey, les flots bleus
miroitent tranquillement sous la nappe dorée du soleil.
La rumeur s'approche. Bain prête l'oreille; ce sont des
cantiques qui s'élèvent ; c'est une procession qui
s'avance. Déjà, il aperçoit sur la route
d'Avranches de nombreux fidèles; des croix et des