bleuâtre,
des terres septentrionales. Bain ne regarde jamais le Mont Bélénus
sans qu'un frisson ne le fasse tressaillir, il sait, par son pasteur,
que le Mont Bélénus a servi d'autel aux faux dieux
et que ses pierres y ont été arrosées de,
beaucoup de sang humain !
Afin de chasser le souvenir de ces abominations, le paysan porte
aussitôt ses yeux sur le Mont Tumbe. Peut-être ce
rocher a-t-il été, lui aussi, témoin des
cruels sacrifices des druides
? Peut-être une statue païenne
en a-t-elle, jadis, profané le sommet, car on y voit (est-ce
une œuvre de la nature ou des hommes ?), une énorme
pierre levée, semblable à celles qui se dressent
hors du sol habité par les Celtes. Mais Bain se rassure
en se rappelant que le Mont Tumbe a été sanctifié,
il y a plus d'un siècle, par le passage des anachorètes
Pair et Scubilion et que les prières des ermites
de Sessiac et de Mandane ont, à jamais, éloigné
les faux dieux d'un pays où leurs temples subsistèrent
si longtemps. Bain sait aussi que Messire Aubert, le pieux évêque
d'Avvranches, médite d'élever une chapelle, au sommet
du Mont Tumbe, en l'honneur du glorieux archange qui triompha
de Satan.
Des paysans d'Astériac sont allés dernièrement
à Avranches; ils y ont appris que Aubert a révélé
à ses chanoines une étrange
vision qui lui est apparue. Pendant qu'il dormait, l'évêque
a reçu de saint Michel l'ordre d'édifier un oratoire
au Mont Tumbe et, depuis quelques jours, le bruit court dans le
pays