Enfin,
après un mois de marche, ils arrivèrent à
Beauvoir sur le bord de la grève.
Au milieu de la mer qui étincelait aux premiers rayons
du soleil, le Mont Saint-Michel se dressait, immense et majestueux;
les flots chantaient un hymne de gloire et d'amour sous les remparts
aux tours crénelées et aux échauguettes pointues;
au sommet, l'abbaye, couronnée par sa basilique à
la flèche ajourée, svelte et gracieuse, découpait
sur le ciel bleu ses murailles dorées par l'aurore.
Enfin, la mer baissa, abandonnant dans sa retraite rapide, les
grèves blanches et luisantes; suivant alors une longue
file de pèlerins venant d'Avranches, les pastoureaux, pieds-nus,
les mains jointes et les yeux baissés, montèrent
à l'abbaye et, dévotement, entendirent la messe.
Ils prièrent longtemps avec ferveur, pour Ieurs parents,
pour leurs maîtres et pour eux-mêmes, sans que leurs
oraisons fussent distraites par toutes
les merveilles surgissant autour d'eux.
Puis, ils sortirent de l'abbaye, désireux de prendre un
peu de nourriture, afin de réparer leurs forces en vue
du retour prochain et ils se mirent en quête d'une hôtellerie
modeste.
Ils hésitèrent longtemps, ayant l'embarras du choix.
De chaque côté de l'étroite rue, ce n'étaient
qu'hôtelleries, pleines de rumeurs joyeuses et d'où
s'êchappaient des fumets délicieux. Au-dessus des
portes étaient accrochés de beaux tableaux représentant
saint Julien, sainte Barbe, saint Pierre.