L'horizon
incertain, deux silhouettes vagues se dessinaient : le Mont Tumbe
et le Mont Bélénus.
Norgod, pensif, s'accouda sur le rebord de la fenêtre et
ses yeux se fixèrent sur la colline lointaine où,
trois siècles auparavant, son prédécesseur
Aubert, touché par le doigt de l'archange, avait fondé
un monastère au cœur de ces grèves immenses
et stériles, qui avaient pris la place de la
forêt de Scissy.
Norgod semblait perdu dans une contemplation muette.
Cependant l'évêque n'avait pour les récentes
calamités qui avaient éprouvé le pays, à
moitié englouti par un cataclysme, ni une pensée
de pitié, ni un regard de compassion, bien que son cœur
fût bon, son âme charitable et sa main toujours ouverte
pour le soulagement des misères humaines; dans sa rêverie,
il évoquait seulement les pieux solitaires qui, sur le
roc aimé par saint Michel, gagnaient une place dans le
ciel par leurs pratiques pieuses, par leur renoncement absolu
aux biens de ce monde et par leurs constantes prières.
Il se reprochait même de ne pas être au milieu d'eux
et d'avoir fermé ses oreilles aux voix célestes
qui, bien souvent dans son sommeil et jusque dans ses veilles,
l'avaient appelé au Mont Tumbe.
La brise matinale, ayant mis un peu de fraîcheur sur son
front, Norgod refermait la fenêtre, quand il poussa un grand
cri:
- Le feu ! Le feu ! Le feu est au Mont