Par
exemple, pas un denier vaillant ! Des pieds nus, des chausses
trouées, pas seulement une devantière de grosse
toile pour remplacer sa peau de mouton qui s'en allait.
Simon Le Priol ne l'avait jamais peut-être regardé.
Ce n'était pas un parti. Simon voulait pour sa fille un
homme de cinquante écus nantais.
Cinquante écus, grand Dieu ! Chaque écu valant douze
livres de vingt sols royaux, à douze deniers
tournois le sol (s'il n'est rogné).
Le petit Jeannin n'avait jamais vu tant d'argent, même en
songe.
Et, en conscience, est-ce bon pour faire des maris, ces séraphins
aux yeux de saphir et aux cheveux d'or ?
Maître Vincent Gueffès disait non.
Parlons de maître Vincent Gueffès.
Front étroit, vaste nez, bouche fendue avec une hallebarde.
Dans cette bouche, une mâchoire monumentale, haute, large,
solide et ressemblant à ces belles mâchoires antédiluviennes,
à l'aide desquelles, quatre cents ans plus tard, les savants
devaient reconstruire tout un monde.
La mâchoire de maître Vincent Gueffès, retrouvée
par hasard, a dû conduire tout droit à l'idée
du mastodonte.
Beaux petits yeux ronds, doucement frangés de rouge, cheveux
couleur de poussière, longue taille maigre et droite dans
une houppelande faite pour autrui : tel se présentait maître
Vincent Gueffès.
Simon Le Priol avait coutume de dire qu'il n'était point
laid.
Simon Le Priol avait raison, en ce sens que maître Gueffès
était affreux.
Du reste, point d'âge. Vous savez, ces bonnes gens ont de
vingt-cinq à soixante ans. Passé soixante ans, ils
rajeunissent.
Eh bien ! avec cela, maître Gueffès était
bas-normand des pieds à la tête. Il avait de l'esprit
comme quatre malins de Domfront, sa patrie. Or, un malin de Domfront
vaut quatre finauds de Vire qui valent chacun quatre citrouilles
de Condé-sur-Noireau, ville où les huîtres
naissent à vingt lieues de la mer !
Maître Gueffès était le rival du petit Jeannin,
le coquetier. Il trouvait