Mont
possède bien une cloche qui se rattache vaguement à
l'Allemagne. »
« Où est cette cloche que je la brise ? » s'écria
ma fougueuse interlocutrice; il est vrai que nous étions
en septembre 1916.
Et la dame de jeter un regard courroucé sur la tour de
l'abbatiale, en agitant convulsivement son ombrelIe roulée,
dont la pomme avait un petit air de massue.
« Calmez-vous, ma chère », suppliait le mari,
un peu gêné.
« Madame, hasardais-je, permettez-moi tout d'abord de vous
faire observer qu'on ne brise pas une cloche avec un manche d'ombreIle;
ensuite que la cloche n'est pas dans le clocher, mais repose tranquiIlement,
tristement, sur le pavé d'une saIIe de l'abbaye. Au surplus,
s'il vous plaisait d'en connaître un peu l'histoire ...»
« J'aime I'histoire, Monsieur, répartit la dame adoucie;
cela tient de famille ; mon père fut un savant; il était
officier d'académie. Parlez-moi donc de la cloche boche.
»
« Madame, lui dis-je, en raison de votre atavisme scientifique,
je ferai mieux; en quelques mots, je vais résumer la campanographie
rnichelienne ; vous savez, cloche en latin se dit campan.
La dame acquiesça d'un air entendu. « Donc, continuai-je,
la première cloche dont les Annales du Mont aient gardé
le souvenir se nommait Rollon; elle sonnait déjà
en 1048, pour rallier les vassaux de