jaunâtre,
que survolent de gracieux oiseaux de mer.
Le temps passe vite, quand l'œil charmé se repose
en jouissant de cet incomparable spectacle; l'heure s'écoule,
l'heure charmante où l'on peut rêver et demeurer
solitaire avec ses pensées; mais voici venir des touristes.
Déjà un groupe, deux groupes ont passé ;
un couple monte; j'entends les éclats d'une voix féminine.
Quel orage vient d'éclater entre lui, homme d'une cinquantaine
d'années, grand, mince, placide, l'air un peu triste, et
elle, frisant la quarantaine, plantureuse, rouge, essoufflée,
batailleuse !
- « C'est une infâmie, s'écrie la dame, en
posant le pied sur la plate-forme de la Tour du Nord. Après
tout, je veux en avoir le cœur net et me renseigner. »
Elle m'aborde ; je me découvre. Dialogue :
« Vous êtes, sans doute, du Mont Saint-Michel, Monsieur
? ... »
« Hélas, Madame, je n'ai pas cet honneur; mais je
connais assez bien l'abbaye. »
:« Alors ! Monsieur, dites-moi vite, est-il exact qu'il
existe au Mont une cloche boche ? »
« Une cloche boche ?» m'écriai-je un peu ahuri.
« Eh ! oui, répliqua la dame, un peu vexée
: Une cloche boche, une cloche allemande quoi ! » Un éclair
ilIumina mon esprit troublé; il s'agissait évidemment
de la cloche que le baron de Bébambourg avait offerte à
l'abbaye en 1771
.« Oui Madame, répondis-je tout aussitôt; le