prises
de bec et, comme c'est l'ordinaire entre femelles de cette espèce,
on s'est ditet redit bien d'injurieuses vérités.
Ridel, effrayé de la persécution de ce gouverneur
à longue robe noire (le prieur) a enfilé la porte
et s'est réfugié à Avranches; je ris de l'aventure
et je vous la raconte en badinant; mais nos juges d'Avranches
le prennent sur un autre ton; l'affaire sera sérieuse,
surtout pour dom Houël. »
Hélas ! Elle le fut surtout pour Ridel.
Ridel avait actionné les religieux en 10000 livres de dommages
intérêts pour le préjudice qu'ils lui avaient
causé, affirmait-il, depuis plus de sept ans, « par
paroles, faits et gestes» ; il offrait d'ailleurs d'en rapporter
la preuve. C'était une somme et les juges d'Avranches,
qui n'étaient pas précisément bien disposés
en faveur des moines, lesquels avaient osé appeler tripot
le Parlement d'Avranches et traiter ses avocats, de petits avocats,
trouvaient qu'en vérité les religieux du Mont étaient
fort encombrants. Ridel attendait donc avec confiance la sentence
de ses juges; quant. aux religieux, ils sollicitaient délai
sur délai : ils ne perdaient pas leur temps.
Le 14 décembre 1765, c'est-à-dire quinze jours avant
que l'affaire Ridel contre Houël ne fut évoquée
devant le tribunal, un, brigadier de la maré-chaussée
de Pontorson cueillait mon Guillaume Ridel sur le seuil de La
Licorne. L'exempt, qui accornpagnait le brigadier, notifia au
pauvre aubergiste une lettre de cachet en bonne et due forme enjoignant
de conduire à Vincennes, de brigade en brigade, le