surnommé
le Dormoux, parce qu'il était plongé, le plus souvent,
dans le sommeil abrutissant de l'ivresse. Des mots on en vint
aux mains et le vieil Alain tua, d'un coup de poignard, le vilain
Collinet. Il est vrai que, celui-ci, nous rapporte la lettre royale
de rémission, eut la.consolation de recevoir, avant de
rendre le dernier soupir, les excuses de son meurtrier, «
en la présence d'un grand nombre de gens ». Cette
amende était fort honorable, mais elle ne satisfaisait
pas la justice du roi. Alain de Longues allait-il donc être
pendu ? De sa geôle, le vieil homme d'armes écrivit
au souverain; il lui dit sa vie aventureuse, ses combats, ses
blessures et comme quoi, durant un demi-siècle et plus,
il avait lutté « pour maintenir les lys en assurance
». Le roi pardonna et fit bien.
De ce jour, Alain de Longues ne toucha plus à une arme;
il se réfugia, croit-on, dans un petit monastère
aux environs de Caen et, avant de mourir, il donna aux moines
soixante sols pour dire un annuel de messes pour le repos de l'âme
du malheureux Collinet qu'il avait si malencontreusement occis.
Hélas! même au-delà du tombeau, le brave Alain
eut encore des aventures, mais il est
probable qu'elles le touchèrent moins que de son vivant.
Peu de jours avant de partir pour un monde meilleur, il avait
vendu à une sienne cousine une petite terre à charge
d'une très modeste rente viagère ; cette terre était
âprement convoitée par la sœur d'Alain, Jacquette
Pottier. Elle éleva, tout aussitôt, une clameur de