jolies
baies noires et elle prend un plaisir infini à s'étendre
sur le sable blond de la plage étroite qui s'enfonce entre
deux grands rochers, couverts de lierre et où tremblotent
de pâles centaurées.
Un matin, Hélène s'était attardée
plus que de coutume dans ses rêveries faites d'espérance
et d'abattement; tout-à-coup, elle aperçut, au pied
du Mont Saint-Michel, un long cortège s'aventurant sur
les grèves dans la direction de Beauvoir; mais la distance
l'empêchait de distinguer si c'était une troupe armée
qui s'acheminait ainsi ou bien si c'était les moines faisant,
suivant la coutume, une procession votive
à rune de leurs chapelles, de la côte.
Sur une tourelle, couronnée d'une plate-forme à
l'air libre, qui flanquait le grand bâtiment abbatial, nouvellement
construit par Ranulphe, elle crut reconnaître la silhouette
d'un moine faisant le signe d'une solennelle bénédiction.
Un pêcheur de coques vint à passer. Hélène
l'appela de sa voix douce. Le pauvre homme qui, tous les jours,
risquait sa vie dans les sables mouvants pour y chercher des coques,
fut bien effrayé en voyant sur le rocher une dame belle,
mais si pâle;
- « Brave homme, questionna Hélène, dites-moi,
je vous prie, que signifie ceci ? »
Du doigt, elle montrait la foule joyeuse qui, à travers
les sables, s'égrenait vers Beauvoir.
- « Dame gentille, répondit le pêcheur, vous
ne savez donc pas que notre bon abbé a reçu, hier
au