métairie
pour la douairière de La Bourdonnaye, là-bas, sous
Pont-Réan. Il était à cheval, jambe de ci,
jambe de là, sur son bât et il allait chantant :
Dansons la litra,
Litra litanrire,
Dansons la litra,
Litra lilanla !
Vous savez, la litra se danse à reculons, en se tapant
les talons devant derrière. Et j'ai connu au bourg de Bains
un tailleur de cercles en châtaignier pour les fûts,
poinçons et barriques, qu'on venait voir danser la litra
de dix lieues à la ronde. Il était borgne d'un oeil
et se nommait Pelo Halluin. Sa soeur Matheline piquait la toile
à voile à la Roche-Bernard et fut mariée
à Juillon le Guennec, qu'on appelait le Bancal, à
cause de ses jambes qu'il avait de travers.
Ce Pelo Halluin... mais c'est de frère Eustache que je
veux vous entretenir, mon bon seigneur.
-Que vous disais-je ? murmura Aubry à l'oreille de monsieur
Hue.
Le vieillard se prit à sourire. Il paraît qu'Aubry
lui avait déjà parlé du digne frère
Bruno et de ses histoires.
-Donc, reprit ce dernier, frère Eustache était alors
un jeune gars, éveillé comme un ver luisant...
-Assez ! frère Bruno, interrompit monsieur Hue.
Le pauvre moine s'arrêta court.
-Aurai-je offensé mon bon seigneur ? balbutia-t-il.
-Assez ! vous dis-je, je vous permets de rester ici avec nous.
Bruno frappa ses mains l'une contre l'autre et poussa un long
cri de joie.
-Mais à une condition, ajouta Maurever.
-Laquelle, monseigneur, laquelle ?
-C'est que, pendant votre séjour, vous ne raconterez pas
une seule histoire.
-Ah ! s'écria le moine en riant de tout son coeur ; voilà,
par exemple, qui n'est pas difficile ! Croyez-vous que je sois
un bavard, Seigneur Dieu ! Cela me rappelle une aventure qui m'arriva
en l'an quarante-quatre dans une auberge de la Guerche.
Nous étions trois : mon cousin Jean, Michel