Il
n'avait pas encore accompli la promesse qu'il avait faite de trouver
le sire de Maurever, mais il s'y était employé de
si grand coeur, que François l'avait récompensé
d'avance en lui chaussant les éperons.
Et comme il faut laisser un aiguillon au dévouement même
le plus ardent, François lui avait promis, en cas de réussite,
les domaines confisqués du Roz, de l'Aumône et de
Saint-Jean-des-Grèves.
De sorte que notre excellent compagnon Méloir avait, dès
ce moment, toutes les sollicitudes du propriétaire.
C'était son bien que les soldats de François avaient
dévasté.
Maurever lui-même n'aurait pas jeté un regard plus
triste sur sa maison saccagée.
Heureusement, Méloir n'était pas homme à
rester longtemps de mauvaise humeur.
Il lança un dernier sarpebleu, moitié comique, et
déboucla son ceinturon.
-Trouvez des sièges, mes enfants, dit-il en se carrant
dans l'unique fauteuil, ou asseyez-vous par terre, à votre
choix. Je suis désespéré de ne pouvoir vous
offrir une hospitalité meilleure. Mais voyons ! on peut
amender cela ; Keravel, toi qui es un vieux soudard, va voir à
la cave s'il reste en quelque coin des bouteilles oubliées
; Rochemesnil, descends à l'écurie et apporte ta
charge de bottes de foin pour faire des sièges ; Péan,
tâche de trouver quelques volets, nous en ferons une table
; et toi, Fontébraut, cherche une brassée de bois
pour combattre le vent des grèves qui vient par les fenêtres
défoncées.
Les quatre hommes d'armes sortirent et revinrent bientôt
les mains pleines. En même temps, Merry, Conan, Kervoz et
d'autres archers arrivèrent, apportant une paire d'oies,
des poules et des canards avec d'énormes pichés
de cidre.
La situation s'améliorait à vue d'oeil.
Keravel avait trouvé dans un trou de la cave une douzaine
de vieux flacons qui semblaient dater du déluge.
Les bottes de foin faisaient d'excellents sièges. Les volets
appareillés, donnaient une table vaste et fort commode.
Il n'y avait pas de nappe, mais à la guerre comme à
la guerre !