Puis
monsieur Gilles murmura : Merci et tomba à la renverse.
Les uns disent que Jean de la Haise et Robert Roussel, lorsqu'ils
vinrent le soir, ne trouvèrent plus qu'un cadavre. Les
autres affirment que Gilles de Bretagne n'était pas encore
défunt, et que les deux infâmes l'achevèrent
en l'étranglant de leurs mains.
Julien Le Priol fit une pause. Personne ne prit la parole. Chacun
était frappé de stupeur.
Julien raconta ensuite comme quoi Monsieur Hue de Maurever, accomplissant
la promesse faite au mourant, était venu, déguisé
en moine, dans la basilique de Saint-Michel, et avait arrêté
le duc François au moment où il allait jeter l'eau
sainte sur le cénotaphe.
Comme quoi Monsieur Hue avait disparu. Comme quoi le jeune homme
d'armes Aubry de Kergariou avait jeté son épée
aux pieds du duc et refusé de poursuivre Maurever.
-Maintenant, reprit Julien, Monsieur Hue se cache on ne sait où.
Le duc a mis sa tête au prix de cinquante écus nantais.
Mademoiselle Reine a disparu, et Aubry de Kergariou est dans les
cachots souterrains du Mont. Voilà ce qui se dit sur le
marché de Dol, mon père et ma mère.
À ces mots : Cinquante écus nantais, deux personnes
avaient dressé l'oreille.
C'était d'abord le petit Jeannin, dont les grands yeux
brillèrent à ces paroles magiques.
Ce fut ensuite maître Vincent Gueffès, lequel gratta
sa longue oreille, et se prit à réfléchir
profondément.
-Et l'on ne sait pas où notre demoiselle Reine s'est réfugiée
? demanda Simon. Julien secoua la tête.
-On dit qu'elle a été d'abord au domaine du Roz,
puis au domaine de l'Aumône. Les vassaux ont eut peur et
l'ont chassée.
-Chassée ! notre demoiselle !
-On dit qu'elle a eu peur d'être chassée aussi du
domaine de Saint-Jean, car les hérauts de la cour vont
partout dans les campagnes, sonnant de la trompe le jour et la
nuit, et promettant male mort à qui abritera le sang de
Maurever !