l'étendue des
grèves; on y va des Quatre-Salines et de Pontorson : ceci
pour la Bretagne.
Les
routes principales de Normandie sont
celles des Pontaubault, d'Avranches et de Genêt.
Suivant
les coquetiers et les pêcheurs, la route de Pontorson est
seule sans danger.
Encore
y a-t-il plus d'une triste histoire qui prouve que cette route-là
même, en temps de marée, ne rend pas tous les voyageurs
que sa renommée de sécurité lui donne.
Le
8 juin 1450, toutes les cloches de la ville d'Avranches sonnèrent
à grande volée, pendant que les portes du château
s'ouvraient pour donner issue à une nombreuse et noble
cavalcade.
Il
était onze heures du matin.
Tout
ce qu'Avranches avait de dames et de bourgeoises se penchait aux
fenêtres pour voir passer le duc François de Bretagne,
se rendant au pèlerinage du Mont-Saint-Michel.
Un
coup de canon, tiré du Mont, à l'aide d'une de ces
pièces énormes en fer soudé et cerclé,
qui lançaient des boulets de granit, avait annoncé
le bas de l'eau, tout exprès pour monseigneur le duc et
sa suite.
Et
ce n'était pas trop faire, que de mettre ces canons au
service du riche duc, car ceux qui les avaient pris aux Anglais
étaient des gens de Bretagne.
Bien
peu de temps auparavant, le duc François avait envoyé
les sieurs de Montauban et de Chateaubriand, avec René
de Coctquen, sire de Combourg, au secours du Mont-Saint-Michel,
assiégé par les Anglais. A cette époque,
le roi Charles VII, de France, avait
déjà
regagné une bonne part de son royaume, et rejeté
Henri d'Angleterre
loin du centre. Mais les côtes de la Manche restaient au
pouvoir des hommes d'outre-mer, et le Mont-Saint-Michel était,
depuis Granville jusqu'à Pontorson, le seul point où
flottât encore la bannière des fleurs de lis.
Montauban,
Chateaubriand, Combourg et bien d'autres Bretons passèrent
le Couesnon, pendant que cinq navires malouins, commandés
par Hue de Maurever, doublaient la pointe de Cancale
et entraient
dans la baie.