la
marée du matin, la mer entoura de nouveau les habitations
et ne s'arrêta qu'à la digue de la Duchesse-Anne,
lorsqu'elle eut repris tout son ancien domaine.
»
L'effort désespéré de la population ne fut
cependant pas inutile; grâce à lui, on arriva à
sauver les logements et les grains qu'ils contenaient; mais toutes
les terres ensemencées des Quatre Salines furent recouvertes
par les eaux et le sable, et longtemps à la suite, elles
demeurèrent incultes. Cette inondation avait occasionné
à la culture plus de, 50.000 francs de dégâts
par la destruction des semences de la partie supérieure
du Polder et des alentours de la ferme. Quant aux dégâts
occasionnés à la digue, ils s'élevaient à
une somme absolument incalculable. L'Etat envoya aussitôt
aux cultivateurs sinistrés un premier secours de 5.000
francs qui fut bientôt suivi de plusieurs autres.
»
Entre cette marée fatale et la marée de mars, on
eut tout juste le temps d'élever un talus pour préserver
les récoltes de l'enclos des Châteaux; mais, jusqu'à
la réparation de la digue qui demanda de longs mois, à
chaque marée, les terres des Quatre-Salines furent inondées.
'»
La Compagnie Mosselrnan pour réparer la digue de ses Polders
dût ouvrir dans la falaise de Roz-sur-Couesnon la grande
carrière des Chouanières; et, afin de transporter
la pierre, elle fit établir entre la carrière et
la digue un petit chemin de fer à bras « genre Decauville»
: c'était le premier qu'on voyait dans le pays.
»
Je serais très heureux, si ces souvenirs pouvaient impressionner
et faire mûrement réfléchir avant qu'on entreprenne
aucun travail important- susceptible de changer l'état
actuel des choses !
»
Puissions-nous en effet, et puissent les générations
futures ne revivre jamais des heures aussi tristes, aussi tragiques,
et aussi angoissantes que celles dont vous venez d'entendre le
récit
D'un
Témoin.