«
Tu vois, Michel, et de la main, il lui indiquait la ville d'Avranches,
perchée sur son promontoire élevé, tu vois
cette cathédrale qui porte fièrement ses deux belles
tours sur le front de sa façade? On dirait, n'est-ce pas?
qu'elle est en prière, dans sa robe de granit, devant le
Mont-Saint-Michel qu'elle contemple au-dessus des grandes grèves
qui l'en séparent.
« Or, le 29 septembre de l'an
1007, Avranches avait pour évêque un saint prélat,
très probablement d'origine norvégienne, comme son
nom le fait supposer: il s'appelait Norgod. Il venait de célébrer
la messe et il se trouvait dans la sacristie de sa cathédrale,
un petit bâtiment accolé au. transept du sud et d'où
l'on apercevait fort bien toute la baie du Mont-Saint-Michel.
« Le soleil n'était pas encore levé et les
dernières étoiles clignotaient toujours, s'éteignant,
une à une, dans la lumière naissante et des brumes
flottaient dans la sinueuse et profonde vallée que dominait
la cathédrale.
« Peu à peu, le brouillard
dégageait les grèves où la mer n'avait pas
encore fait sa rapide montée; et, sur l'horizon incertain,
deux silhouettes vagues se dessinaient : Tombelaine et le Mont-Saint-Michel.
Norgod regardait précisément le Mont où,
trois siècles auparavant, son prédécesseur
Aubert, touché