grosse.
C'est la cloche de guerre de la forteresse. Chose étrange,
elle a le même nom que celle de Gand, qui, elle aussi sonne,
« quan il y a guerre en Flandre» selon le proverbe
des pays du Nord. Rollon est
un des plus vieux serviteurs de l'abbaye. Il fut fondu et monté
dans cette tour, dans le courant du onzième siècle.
Sa voix grave et puissante avait pour mission de rallier les vassaux
de l'abbaye, quand elle était menacée par les
Bretons, qui faisaient de fréquentes incursions sur
les terres du monastère. Elle sonna furieusement au cours
de la guerre qui ensanglanta nos grèves, de 1420 à
1450, mais elle accompagna aussi, bien souvent, le chant du Te
Deum, qui montait. reconnaissant vers Dieu, après nos victoires
signalées sur les Anglais. Elle fut épargnée,
par bonheur, par miracle. pourrait-on dire! dans un terrible incendie
occasionné par la foudre, en l"an 1300. Le feu du
ciel tombait fréquemment sur notre clocher, que les vieux
manuscrits appellent la plus haute tour du royaume. L'incendie
qui éclata au commencement du quatorzième siècle
fut terrible le métal coula à flots «fluilt
ru rivis» dit le bon annaliste bénédictin
qui consigna la catastrophe. Le désespoir, un moment, s'empara
même des moines. Ils se demandèrent, en présence
de cinq incendies successifs, s'il fallait continuer à
bâtir d'aussi superbes édifices.