des
endroits mous, durcis seulement à la surface et appelés
par les marins-pêcheurs de la baie lizes ou paumelles. Ces
lizes ont englouti, au moyen âge surtout, de nombreux pèlerins
qui s'étaient aventurés, sans guide, sur les grèves.
A peine arrivés sur la côte, ces imprudents étrangers
se dirigeaient droit vers ce beau Mont-Saint-Michel qui, par un
singulier effet de mirage, fréquent dans la baie et dû
à la réfraction des couches atmosphériques,
leur paraissait être à quelques pas, alors qu'ils
en étaient séparés par plus d'une lieue.
S'ils avaient le malheur de tomber dans une lize, ils y disparaissaient
bientôt emportés par la plus affreuse des morts.
Un ancien manuscrit de l'abbaye Michelienne déposé
aujourd'hui à la bibliothèque municipale d'Avranches
et connu sous le nom d'Obituaire, mentionne plusieurs catastrophes,
survenues à des pèlerins perdus dans la brume, noyés
dans les flots ou engloutis dans les sables. C'est que les Bénédictins
n'oubliaient pas la mémoire de ces pauvres disparus; et,
à certaines dates, consignées dans le recueil funèbre
que l'on ne feuillette pas sans émotion, ils célébraient
des messes pour le repos des âmes des pèlerins connus
ou inconnus, victimes des flots et des sables mouvants.
Les enlisements sont, aujourd'hui,
bien moins fréquents, le Mont n'étant plus isolé
en pleines grèves;