abbaye;
il en avait pris possession par procureur; il ne se préoccupait
que d'une chose : en toucher les revenus»
«Sale ,luif !», hurla mon interlocutrice.
« Cependant, apprenant que la cloche ne rendait plus qu'un
son de chaudron, il écrivit au prieur qu'il l'autorisait
à distraire de la bourse conventuelle une somme suffisante
pour avoir une cloche de brume. Ainsi fut fait; la vérité
historique m'oblige à dire que cette cloche est puissante
et jolie. Elle porte la date de 1771 ; les armes de l'abbaye bénédictine
sont gravées dessus. Elle gît, aujourd'hui, lamentablement,
dans une salle retirée du Mont, où personne ne la
voit; elle serait mieux à sa place, dans le nouveau clocher;
mais les crédits manquent pour dérouiller le battant
et acheter la corde. Vous voyez donc, Madame, que cette cloche
est aussi peu allemande que possible. »
« N'empêche, repartit la visiteuse, que cette cloche
a du sang de boche dans les veines !»
« J'aime, répondis-je, la figure charmante de cette
comparaison inattendue; mais je vous en prie, Madame, calmez votre
émoi. Un jour viendra où les finances de la République
permettront de remonter en son beffroi la cloche de Bébambourg;
elle reprendra alors, dans la tour, une place d'honneur et elle
donnera de nouveau adresse aux pauvres gens perdus dans le brouillard.
»
Et la grosse dame et son long mari, après m'avoir remercié
chaleureusement de cette petite leçon d'histoire