-Je ne mourrai pas seul ! cria Méloir. Au moment où
son autre main allait toucher le col de Reine, Aubry passa, plus
rapide qu'une flèche. Sa lance avait traversé de
part en part la gorge de Méloir. Méloir blasphéma
et lâcha prise. Le sable cacha sa blessure. Il n'avait plus
que la tête au-dessus de la tangue. Et la mer mouillait
déjà les vêtements de Reine qui, elle aussi,
s'enlisait lentement. Aubry sauta sur le sable, et mit sa lance
en travers pour assurer ses pieds.
-Tu n'auras pas le temps ! dit Méloir en souriant au flot
qui vint lui baigner le visage. Un visage de réprouvé
! Le cheval, dès qu'il sentit l'eau à ses pieds,
souffla et mit le nez au vent, cherchant la direction de sa fuite.
Aubry se sentit défaillir, car l'imagination ne peut rêver
un danger plus terrible et plus prochain que celui qui l'écrasait
de toutes parts.
Si le cheval partait, Reine était perdue sans ressource.
Aubry la quitta, saisit la bride du cheval et la mit dans la gueule
de maître Loys en commandant :
-Ne bouge pas ! Le cheval révolté fit un bond.