Mais
Jeannin ne le laissa pas achever.
-Pour ce qui est de vous, l'homme, dit-il rudement, on ne vous
parle point ! Et si vous voulez causer tous deux, allez m'attendre
à la porte !
Simon et sa femme se regardèrent encore. Ce petit Jeannin,
plus poltron que les poules ! Maître Gueffès essaya
de sourire, ce qui produisit une grimace très laide. Jeannin
se retourna de nouveau vers le métayer et la métayère.
-Voyez-vous, dit-il en forme d'explication, je n'aime pas ce Normand-là,
parce qu'il rôde toujours autour de Simonnette.
-Et qu'est-ce que ça te fait, petiot ? demanda Simon en
riant.
La figure de Jeannin exprima l'étonnement le plus sincère.
-Ce que ça me fait ! répéta-t-il ; mais je
ne vous ai donc rien dit depuis que nous bavardons là !
Ça me fait que Simonnette est ma promise...
Simon et sa femme éclatèrent de rire pour le coup.
-Oh ! le pauvre Jeannin ! s'écria Fanchon, en se tenant
les côtes, il a bien sûr marché sur le trèfle
à quatre feuilles !
Il n'en fallait pas tant pour déconcerter le petit Jeannin.
Toute sa vaillance tomba, et les larmes lui vinrent aux yeux.
-Dam ! fit-il, puisqu'il ne faut que cinquante écus nantais.
-Et où les pêcheras-tu, garçonnet, les cinquante
écus nantais ?
Jean tira de dessous sa peau de mouton l'escarcelle de fines mailles,
qui scintilla aux lueurs du foyer.
Simon et sa ménagère ouvrirent de grands yeux. Maître
Gueffès allongea le cou pour mieux voir.
-Qu'est-ce que c'est que ça ? demandèrent à
la fois Simon et Fanchon. Jeannin souriait.
-Ah ! mais ! répondit-il, quand on tient la Fée
des Grèves, elle donne tout ce qu'on demande !
-La Fée des Grèves ! répétèrent
les deux bonnes gens stupéfaits.
Maître Simon Le Priol était un peu dans la situation
d'un charlatan