sollicitude
pour tout ce qui se rattache aux intérêts de votre
département, je sens mon hésitation s'évanouir;
ne serait-ce pas d'ailleurs manquer à mes devoirs que de
laisser ignorer à l'autorité supérieure les
dangers qui nous pressent ? Quand le
péril est extrême il faut s'empresser de le lui signaler,
afin de la mettre à mètre d'en prévenir les
funestes conséquences. Or, Monsieur le Préfet, jamais
les marais de Dol n'ont été sous le coup d'une plus
imminente catastrophe.
Depuis
le dernier rapport, relatif aux envahissements du Couesnon, que
j'ai soumis au conseil administratif des digues, et que j'ai eu
l'honneur de vous adresser, bien loin que notre position se soit
améliorée, elle s'est, au contraire, singulièrement
aggravée et s'aggrave chaque jour encore davantage; il
suit, dans ce moment la marche qu'il s'était tracée
il l'époque de nos désastres, lorsqu'il renversa
nos digues, livra passage à la mer, qui envahit notre territoire
et causa aux propriétaires une perte évaluée
à plusieurs millions; il se dirige vers l'ouest, entraînant
la dévastation sur son passage. Les digues des enclos limitrophes,
amodiées par l'Etat, encore intactes il ya quelques semaines,
sont aujourd'hui totalement ou en grande partie détruites
et, journellement, on voit des masses
de terres chargées de blé se détacher de
ses enclos et
s'engloutir dans le torrent; le sol, dans cette partie de la grève,
s'est abaissé d'une manière effrayante, les digues
de l'association elle-même ne sont pas restées à
l'abri de ce fléau dévastateur : elles sont sapées
sur plusieurs points par les affouillements de celte rivière
envahissante, et nous craignons de les voir s'y abîmer elles-mêmes;
mais ce qui ajoute encore à nos appréhensions déjà
si légitimes, c'est l'apparition de la Sélune au
côté sud du Mont-Saint-Michel qu'elle enveloppe dans
les trois quarts de son étendue, et si, ce qui n'est malheureusement
que trop vraisemblable, par suite de l'abaisssement de la grève,
elle vient à se réunir au Couesnon, je le dis avec
l'accent d'une conviction profonde non seulement c'en est fait
de tous les terrains amodiés par le domaine, mais nos marais
eux-mêmes subiront le même sort.