pensées
ne divise ce moment contemplatif. L'unité des horizons
se livre simple, en quelque manière, comme la présence
de Dieu. Un seul regard la possède et s'en souvient : la
flamme du zénith blondit les tangues grisâtres, vaporise
sous une buée qui s'azure le chenal des rivières
incertaines, et se fond, au bout des grèves, avec la mer
ensoleillée. L'air bleu coule sur ces espaces où
rien ne lui fait obstacle, les submerge d'un souffie presque spirituel,
diaphane et tremblant. Les reliefs stables du paysage, Tombelaine,
la côte normande, Chausey,
tout s'absorbe dans la même vibration solaire, tout se tait
et adore avec moi. Je m'abandonne à une sorte d'extase,
sans oublier cependant qu'elle sera brève. Car, tout à
l'heure peut-être des nuages, comme des fumées, déplieront
leur ombre au long des sables, et les ailes d'or de l 'Archange,
là-haut, derrière nous s'assombriront. Pourquoi
serait-ce un motif de moindre joie ? Les moines, lorsqu'ils se
promenaient