On
ne cite, comme certain, que deux personnes qui y aient été
enfermées à demeure, et certes c'est trop, surtout
lorsque ce supplice n'a eu pour cause que des blessures faites
à l'amour propre. L'une était un gazetier de Hollande,
où
était l'abominable cage. J'y entrai avec un sentiment d'horreur,
M le duc de Chartres, avec une force au dessus de son âge,
donna le premier coup de hache à la cage. Je n'ai rien
vu de plus attendrissant que les transports et les acclamations
des prisonniers pendant cette exécution. C'était
sûrement la première fois que ces voûtes retentissaient
de cris de joie. Au milieu de tout ce tumulte, je fus frappée
de la figure triste et consternée du suisse du château,
qui considérait ce spectacle avec le plus grand chagrin.
Je fis part de ma remarque au prieur, qui me dit que cet homme
regrettait cette cage, parce qu'il la faisait voir aux étrangers.
M le duc de Chartres donna dix louis à ce suisse, en lui
disant qu'au lieu de montrer, à l'avenir, la cage aux voyageurs,
il leur montrerait la place qu'elle occupait. Je fus charmée
d'avoir vu ce lieu si triste, mais singulier, ce château
amphibie, rejeté tour à tour par la terre et par
la mer. Car ce mont est pendant une partie du jour, une île
isolée, au milieu des flots, et pendant l'autre partie,
il se trouve porté sur une vaste étendue de sable
aride.